Chronique :

Avec ce roman, Graham Masterton prend un risque car, dans le domaine de l'horreur, mettre des enfants au centre de l'intrigue n'est pas évident. Âme sensible s'abstenir ! Heureusement, l'auteur a su amener son sujet sans donner l'impression de jouer sur cette carte pour provoquer des sentiments exacerbés chez le lecteur. Le postulat de départ est simple : lors d'une intervention dans les égouts pour analyser un grassberg, Gemma et son équipe sont attaqués par des enfants monstrueux. Très vite, la situation se complique avec d'autres agressions et des fœtus hideux qui cherchent à s'implanter dans des femmes pour les utiliser comme mères porteuses. Le détective Pardoe et la sergente Patel, identifiés comme spécialistes des phénomènes étranges au sein de la police, sont appelés à la rescousse. Ils finissent par trouver un lien avec une vieille histoire de sorcière...

L'intrigue principale n'a rien de complexe, mais l'auteur construit autour un microcosme d'événements très perturbateurs et, il faut bien le dire, particulièrement sanglants. Le tout baigne dans le surnaturel et les amateurs de sorcellerie seront ravis de découvrir ce que l'auteur a fait pour l'intégrer à son récit. L'ensemble est bien mené, le lecteur sent la tension monter au fil des pages et, si l'issue est assez prévisible, il y a, en fin de roman, une petite surprise qui ne manque pas de piquant. Je ne suis pas spécialement branchée "horreur", mais j'ai passé un bon moment avec cette histoire.

Les personnages sont très classiques et les deux héros, collègues et amis, n'ont rien de très original. Un défaut ? Pas vraiment, au contraire. Ils représentent bien des personnes que nous pouvons rencontrer dans la vie réelle. Les flics barrés, borderline ou excentriques à souhait, ça fait sourire cinq minutes, mais au-delà il faut admettre qu'ils ne seraient pas tolérés dans un service digne de ce nom. Là, ils sont justes bien dosés, même si l'auteur aurait pu jouer un peu plus avec les origines pakistanaises de Patel. En fait, le couple est déjà apparu dans un autre roman, Ghost virus, et cela explique peut-être qu'il n'ait pas plus appuyé le développement des personnages, puisque le lecteur est censé les avoir déjà rencontré (en supposant qu'il ait lu le tome précédent, bien sûr). Bref, cela se comprend. Les personnages secondaires sont bien mis en place et je donne un bon point à la méchante sorcière, qui se révèle à la fois ignoble et humaine, d'une certaine manière, alors qu'elle a peu de dialogues pour s'imposer dans l'histoire. C'est assez bien réussi, je trouve.

Côté style, j'ai globalement retrouvé Masterton, même si, dans la première partie du roman, certaines phrases m'ont paru bizarres (ex : "la porte gisait à demi ouverte", "le cerveau bouleversé" ou encore "il était à l'agonie" pour dire qu'il était essoufflé). Dans la seconde moitié, je n'ai rien vu de tel, juste des chiffres au format belgo-suisse qui peuvent perturber. À part ça, l'auteur va toujours à l'essentiel et ne s'encombre pas de formulations alambiquées qui alourdiraient son récit.

Pour résumé, si vous êtes amateur d'horreur et de sorcellerie et si le thème des enfants comme victimes ne vous pose pas de souci, allez-y les yeux fermés, ce roman vous fera passer un bon moment (sanglant, bien sûr).